Le Marathon de Bombay : où la ville se réapproprie son territoire...
Ce matin, j'ai ouvert les yeux en pensant somnoler encore un peu... quand une clameur soudaine m'a tirée de mon lit : c'est le marathon !!! Mais oui, il passe dans ma rue, on n'entend d'ailleurs aucun klaxon et aucune voiture (dingue !). Les coureurs vont passer, je veux voir ça absolument. Je vois voir les Indiens courir, je veux voir les rues vides de voitures et pleines de monde, je veux voir les habitants planter leurs deux pieds dans le bitume et crier "c'est MA ville !" !!!
Ni une, ni deux : je saute dans mes habits et sur mon appareil photo (ceci est une figure de style : laquelle ?), et me voilà à potron-minet entre mes voisins, sur le trottoir à guetter les coureurs. Qui sont en fait déjà nombreux : ceux du semi-marathon, partis plus tôt, arrivent en masse, pour certains encore vaillants d'autres épuisés (ils ont déjà fait 8 km). En plus, la rue où j'habite est en montée, héhéhé !
Nombreux, toujours plus nombreux : on croirait que cette marée humaine ne va pas cesser. Des hommes, des femmes (jamais vu autant de jambes nues en Inde !!!), des jeunes, des vieux, quelques Occidentaux et beaucoup beaucoup d'Indiens, et tout à coup, une clameur, les voilà !!! Quelques flèches noires qui passent, rapides comme l'éclair (sont fous, vont jamais tenir...) sous les applaudissements.
Et ce qui est étonnant c'est que les spectateurs ne sont pas très nombreux. Nous sommes tout au plus une cinquantaine sur cette portion de route : mais nous faisons du bruit ! Des messages pour papa, pour le voisin ; les associations de quartier ne sont pas en reste, non plus que les associations tout court car ce marathon est caritatif avant tout. Les coureurs eux aussi ont des messages à faire passer, caritatifs parfois, politiques souvent. Et chacun sait de quoi l'on parle. Chacun comprend que les quelques drapeaux brandis, les quelques cris "Jai Hind" ("longue vie à l'Inde !", "vive l'Inde !") sont destinés à faire face à l'adversité. Pour ma part, et parce qu'on ne change pas une Moufette, j'ai applaudi quelques coureurs et coureuses, mais j'ai battu des mains à tout rompre et hurlé "Taiwaaaaaaaaaan !" en voyant passer un coureur taïwanais puis "Hongkong, good job !" en voyant le drapeau de Hongkong sur un dossard. Ben oui. Même en Inde...
Distribution de bananes, de sel, de biscuits, d'eau... et banderoles des associations de quartier.
Un moment très émouvant en fait. Tout le monde me sourit, se laisse prendre en photo, tout le monde applaudit et on insiste plus particulièrement pour les Occidentaux qui passent (sans doute les Indiens se disent qu'ils sont courageux, par cette chaleur à laquelle ils ne sont pas habitués et dans une "ville d'adoption"). Au final, tous ces gens, coureurs et spectateurs, n'ont qu'un but : se réapproprier leur ville.
Si tu veux voir une provocation gratuite, va voir ma vie de Moufette !