Le bungalow de Rudyard Kipling (Bombay).
C'est Bombay. Au détour de rien, au fond d'une ruelle, au passage et au milieu d'immeubles décatis informes se trouvent de petites merveilles. Le quartier portugais de Khotachiwadi par exemple. Ou bien la maison où naquit le 30 décembre 1865 l'écrivain britannique Rudyard Kipling.
En soi, les lieux de naissance m'importent peu : en quoi cela peut-il influencer une oeuvre, un style, une vision, que d'être né ici ou là ? Mais dans le cas de Kipling, cela prend une autre dimension : envoyé dès six ans en Angleterre pour étudier, il garde une trace prépondérante de son séjour en Inde, marqué par deux retours sur des lieux qui ne cesseront de le hanter, dans ses livres notamment : Le Livre de la Jungle, bien sûr, mais aussi ses poèmes et ses nouvelles. Un souvenir d'une Inde ressentie "de l'intérieur" ressassé et choyé.
Mother of Cities to me,
For I was born in her gate,
Between the palms and the sea,
Where the world-end steamers wait.
("To the City of Bombay",
dédicace de Seven Seas)
Et ce bungalow alors ? Il s'agit d'une grande maison à étage, en bois de teck, le bois le plus dur et le plus résistant qui existe, sise sur le campus de la J. J. School of Art et J. J. School of Applied Art. Le père de Kipling, John Lockwood en a en effet été le premier directeur et y était professeur de sculpture architecturale (on lui doit notamment les frises du "Crawford Market", dont je vous reparlerai). En réalité, la maison a été reconstruite quelques années plus tard ; depuis, tous les doyens de cette école y demeurent, jusqu'à ce qu'elle soit un jour transformée en musée. Peut-être...
On ne la voit pas de la rue, bien sûr, mais au détour d'une allée mal entretenue et au travers d'un fouillis feuillu, elle se dresse, sereine, avec ses panneaux de bois ajourés repeints de vert.